Vers le Nord, la rue de la Banasterie, dès que l'on perdait le château de vue, quittait les rues étroites et traversait une zone de champs et de vergers. Mais très vite le paysage changeait à nouveau d'aspect. Laissant sur la gauche le quartier des vanniers qui avait donné son nom à la rue en bordure de la Sorgue, on pénétrait dans le quartier des tanneurs.
Des maisons à un étage bordaient des canaux où coulaient les eaux dérivées de la rivière et les odeurs caractéristiques du quartier des Tanneurs venaient s'imposer aux narines délicates.
Des ouvriers, les pieds dans l'eau et silencieux car courbés sous l'effort, creusaient dans le lit des cours d'eau les fosses où seraient laissées à tremper les peaux recouvertes de tan pendant plusieurs mois. D'autres, se répondant à voix forte d'un atelier à l'autre, raclaient les restes de chair et la graisse, éliminant sur certaines peaux les poils pour en faire du cuir ou les conservant pour les fourrures, ces résidus étant entreposés ensuite à l'arrière des échoppes où ils pourrissaient, empestant la charogne.
A l'étage des maisons qui se composait de greniers non fermés pour assurer une meilleure ventilation, les peaux après traitement étaient soigneusement tendues sur des cadres de bois pour séchage.
Nul ne se rendait à la Banasterie s'il n'avait à y faire, pourtant le quartier connaissait un intense va-et-vient : livreurs de peaux brutes accostant sur les quais bordant la Sorgue ou venant en charrette depuis les portes de la ville, mais aussi parcheminiers, pelletiers ou cordouaniers qui venaient se fournir en matières premières.
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Hersende de Brotel