Nul n'aurait pu douter que le Plan de Lunel fût le quartier le plus recherché par tout ce qu'Avignon comptait de nobles, nobliaux, clercs ou bourgeois soucieux de tenir leur rang.
L'attraction exercée par le château et la proximité des institutions marquisales se voyait dans la richesse des demeures bordant la rue Kalanquin, ainsi nommée en l'honneur du premier Marquis couronné.
Toutes les demeures rivalisaient d'opulence : cela allait de la simple maison cossue de pierre au petit palais bâti par quelque membre de la haute noblesse. Là, derrière la façade ouvragée ornée de frises, percée de larges fenêtres à remplage dont les chapiteaux étaient finement sculptés de feuilles ou de monstres, s'ouvrait une vaste cour intérieure, desservant les différents corps de bâtiments. Mais l'on voyait aussi de nombreuses maisons bourgeoises aux baies géminées dont le rez de chaussée s'ouvrait sur une boutique.
La chaussée, entièrement pavée, résonnait du pas des chevaux des voitures des courtisans. Une foule composite d'érudits au service du Marquisat, de domestiques affairés, de livreurs et de mendiants espérant quelqu'aumône s'écartait pour laisser passer les litières aux rideaux fermés transportant des nobles.
Au-delà de la place du 22 novembre dont le nom rappelait la date de l'indépendance de la Provence, les calades elles aussi empierrées partaient à l'assaut du rocher des Doms.
Première vision de la ville quand on franchissait la porte St Benezet, le plan de Lunel affirmait à tous les regards le rayonnement de la capitale du Marquisat.
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Hersende de Brotel